Ce que je vois surtout, c'est un paysage bouleversé, souvent renversé, une profusion d'initiatives médiatiques individuelles et des polémiques qui naissent sur Internet, et des documents, passés à la trappe des médias, qui ressurgissent sur la toile.
Dernier en date, le fameux "coming out" politique d'Alain Duhamel : ce "scoop" serait resté dans l'ombre des médias traditionnels si la fameuse vidéo où l'éditorialiste explique qu'il votera François Bayrou n'avait pas été repérée par un blogueur 10 jours après avoir été postée sur Dailymotion (voir la vidéo ici sur quelcandidat.com).
Dailymotion, justement. Ce clone français du géant YouTube, est en train de s'imposer depuis le début de la campagne comme LA "télévision" de la présidentielle. C'est sur Dailymotion qu'ont surgi la plupart des documents vidéo qui ont agité la campagne. C'est encore sur cette plateforme entièrement dédiée au contenu généré par l'utilisateur que l'on peut voir ou revoir les débats télévisés de la veille.
C'est aussi sur Internet que surgissent, spontanément, depuis quelques mois, de nouvelles chaînes de "télé" : La télé libre du reporter John-Paul Lepers, ancien de TF1 et Canal+. "IPol", le magazine de la présidentielle, par des anciens de Canal+ également. Et puis il y a les "little is big". Les amateurs d'hier élevés au rang de médias de demain : Nicolas Voisin, chômeur talentueux, crée avec trois sous le "Politic Show", programme vidéo phare de la couverture de la campagne électorale sur le Net. En quelques mois, ce "journaliste citoyen" a bouleversé, plutôt en bien, les codes du journalisme télé et de l'interview.
Enfin, quand le publicitaire star Jacques Séguéla décide de l'ouvrir, que fait-il ? Il crée sa télé sur Internet :
Evénement médiatique majeur, où la frustration du citoyen en mal d'expression face aux médias est la plus forte (on se souvient du séisme du "non" au référendum), l'élection présidentielle est en train de faire émerger brutalement un phénomène en gestation. La prise de parole spontanée n'a jamais été aussi abondante. Vous voulez devenir média ? Tentez votre chance sur Dailymotion. Ou sur Agoravox. Ou, depuis quelques jours, sur quelcandidat.com qui ouvre la marche en France du média collaboratif.
Entre Dan Gilmor "vous êtes le média" et Time Magazine "L'homme de l'année : vous", il y a eu deux ans. Le temps de la validation d'une prise de pouvoir : celle de l'utilisateur sur les médias. Une prise de la Bastille. L'implosion du quatrième pouvoir, qui ne disparait pas, mais doit désormais faire avec l'autre.
Et il n'a pas le choix, car c'est toute son économie qui est remise en cause.
Le cinquième pouvoir, ce n'est pas Internet, comme l'explique Thierry Crouzet dans son livre éponyme, le cinquième pouvoir c'est "vous". Et Internet est son vaisseau. Plus qu'un média, ce "vous" qui s'active via Internet façonne non seulement le paysage de l'information, mais bouleverser également les rapports sociaux et économiques. On n'a pas fini de philosopher sur la question. La psychanalise a exploré l'esprit humain. Il nous faudra un nouveau Freud ou Jung pour décrypter ce nouveau "ça".
7 commentaires:
Est-ce qu'à tous vouloir en être commentateur, on ne perd pas de vue l'essentiel, être acteur de la vie politique de sa commune, sa région, son pays ?
Avez-vous pris connaissance de l'initiative du Midi Libre de lancer un blog d'information sur la ville de Sète ? Le cas échéant, qu'en pensez-vous ?
www.seteblogs.com
Je te trouve un peu trop lyrique... :)
Pour ma part, je ne crois pas qu'Internet revolutionne la campagne. Je ne vois là qu'un déplacement du centre de gravité, et sur des pecadilles qui sont loin de pouvoir retourner une opinion.
Mon avis est qu'un prime-time sur TF1 avec 10 millions de spectateurs pesera toujours dix mille fois plus qu'une vidéo volée postée sur Agoravox.
Le 5ème pouvoir n'est pas Internet, et n'est certainement pas non plus "Vous". Le "Vous" en question n'est un pouvoir que quand il vote, certainement pas quand il poste des "commentaires participatifs" qui n'intéresse que sa famille.
Et que je sache, le vote n'est pas né avec Internet.
C'est un peu tranché, mais c'est mon opinion... :)
Globalement d'accord avec toi.
Je ne crois pas qu'Internet révolutionne la campagne présidentielle.
Ce que je dis, c'est que c'est la présidentielle qui révolutionne Internet. En tout cas qui accélère cette révolution sur le plan des médias.
Benoit > oui, oui, j'avais bien lu, et sur ce point, je suis d'accord.
Il y a beaucoup de produits convergents (cf Mediascope à La Montagne, itw télé locale, reprise sur le net en FLV, et sur le papier, avec questions amont par les lecteurs, ou les soirées blog à 20mn) qui ont vu le jour sur l'opportunité de la campagne (et c'est très bien comme ça).
C'est vrai que c'est plutôt internet qui est révolutionné par la campagne présidentielles que l'inverse. Des initiatives intéressantes apparaissent ça et là et constituent de réelles sources d'informations (je pense à Ipol, Politicshow...), pilotées par de vrais journalistes avec une certaine déontologie. Pour le reste, la blogosphère a une fâcheuse tendance à s'autoproclamer élément indispensable, voire décisif des prochaines élections. Avec des comportements qui frisent le ridicule. L'engouement actuel pour "Second Life", comment ne pas en rire ?
Bonjour, il est vrai que les "nouveaux médias" connaissent un essor sans pareil avec la campagne présidentielle chacun peut (ou a l'impression de pouvoir) donner son avis via son blog ou ses différents commentaires!
Je rédige actuellement un mémoire sur le sujet des nouveaux médias amateurs et de leur eventuel role de cinquieme pouvoir je suis donc preneur de toute information pouvant completer ma base de données actuelle :)
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