Affichage des articles dont le libellé est anniversaire. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est anniversaire. Afficher tous les articles

mardi 9 septembre 2008

Le Post, un an: naissance d'un média ouvert


A une exception près, je n'ai jamais voulu parler sur ce blog de mon expérience au Post.fr. D'abord parce qu'il s'agit d'un blog personnel dont l'objectif est d'ouvrir des conversations sur l'évolution des médias et du journalisme, et qu'il est toujours compliqué de parler de son propre média sans donner l'impression de faire de l'autopromotion.

Néanmoins, cela fait un an, jour pour jour, que Le Post s'est lancé dans la grande aventure du Net. Et j'ai appris tellement de choses, sur des thématiques explorées depuis si longtemps sur ce blog, que je trouvais  dommage de ne pas les partager ici.

(Et puis on m'a demandé d'écrire quelque chose dessus, donc...)

En fait, la vraie date n'est pas exactement le 10 septembre 2007. Nous avons appuyé sur le bouton de mise en ligne, la veille. C'était un dimanche après-midi. Nous étions (moi surtout) dans un état de stress indescriptible. Je n'étais pas loin de m'évanouir. Ces moments de trac sont tellement stimulants. 

Que voulions nous faire à l'époque? Que voulons-nous faire aujourd'hui? Qu'avons nous appris durant ces 12 mois de passion?

D'abord, des chiffres: 
Le 9  septembre, nous avons reçu 1500 visites. Le lundi 10, elles grimpaient à 18.000.
Un an plus tard, nous oscillons entre 160.000 et 200.000 visites par jour, et 400.000 pages vues.
Depuis janvier 2008, le Post.fr enregistre une progression de 20% de son audience, chaque mois. Les chiffres OJD nous créditent en juillet 2008 de 3,8 millions de visites (1,5 million en janvier...), plus de 10 millions de pages vues, nous plaçantpour la première fois devant les sites de l'Express et du Point, et juste derrière celui du groupe Parisien/Aujourd'hui en France.
Même progression sur Nielsen où nous flirtons désormais avec le cap symbolique du million de visiteurs uniques.

Bref, un an après, Le Post.fr, le site laboratoire du Monde Interactif (éditeur du Monde.fr), est devenu un média sur lequel il faudra désormais compter.

En un an, il nous a fallu installer une nouvelle marque dans un paysage déjà saturé. Nous avons dû transformer ce bébé site en un adolescent vigoureux. Mais, surtout, nous voulions inventer de nouvelles pratiques.

Pourquoi, d'ailleurs, une nouvelle marque? Pourquoi un site grand public et pas un média dans la tradition d'audience du groupe qui portait le projet?

Parce que nous avions besoin de cette liberté pour explorer toutes les facettes des mécaniques nouvelles des médias sur Internet.  Nous avions besoin de casser les barrières de l'information traditionnelle : pas de hiérarchie de l'information, pas  de navigation classique,  interfacer l'activité d'une rédaction avec la production de contenus générés par l'utilisateur, voir l'information comme un réseau, sortir du mythe du "journalisme citoyen" pour tenter le pari de la contribution populaire et du journalisme collaboratif.

Pas simple. Pas toujours bien compris. Mais nous n'avons jamais laché. 

Nous avons construit Le Post comme une radio, car la radio est sans doute le média qui se rapproche le plus de la dynamique de conversation du web2.0 (ce n'est d'ailleurs pas un hasard si l'on a comparé les blogs aux premières radios libres) et de la dimension "live" du Net. 

Nous voulions un site qui se rapproche le plus possible du quotidien et du rythme de ses lecteurs: la Une devait aborder les sujets de conversation du moment, ceux que l'on évoque à la machine à café: l'info générale, mais aussi le dernier fait-divers, l'actu locale, l'émission de télé de la veille, un grand débat de société ou le buzz du jour. C'est de cette volonté de coller aux conversations des internautes que découle la dynamique participative.


Qu'avons nous compris finalement ?

1- Que la porte d'entrée du site, ce n'est pas la Une (moins de 20% de l'audience). L'interface de navigation: c'est Google, les autres sites, les flux rss. Et ça change tout. L'info se construit différement, elle ne se distribue plus de la même manière. Elle est liquide, atomisée, hypersegmentée, hypersémantisée (grace aux tags). Sur Le Post, les canaux de distribution des news sont trois fois plus variés que sur les sites traditionnels.

2- L'info n'est plus une info centrée sur une rédaction, elle est une info de réseau. "Do what you do the best, link to the rest" (faites ce que vous savez faire de mieux, faites des liens vers le reste): sur Le Post, la plupart des articles renvoient vers l'extérieur, vers le meilleur du web. Si un média a bien traité un sujet, nous faisons un lien vers lui. Si nous estimons qu'il faut aller plus loin, la rédaction intervient.

3- La participation à l'info est-elle un mythe? Le journalisme citoyen, oui, le média participatif non. Sur le Post, les internautes publient entre 150 et 300 contributions chaque jour. 1/4 des contenus passés en Une sont issus de la communauté. 
Les internautes vont chercher leurs infos sur le Net, les relient entre-eux, les opposent, ils mettent le doigt là où d'autres médias n'avaient rien vu. Excellents lecteurs, ils se faufilent dans les interstices d'une info saturée pour en faire jaillir du sens, et créer de nouveaux contenus. 
Ils ne font évidemment pas que de la veille d'info, ils sont aussi les premiers témoins de leur actualité. Parmi les 100.000 commentaires postés chaque mois, de nombreux témoignages ont été recueillis par les journalistes.


4- L'info échappe aux journalistes. A côté de l'info traditionnelle, jaillit une autre information, brute et non vérifiée. Le rôle des journalistes se re-dessine aux abords de cette nouvelle réalité. Nous avons besoin également d'une nouvelle traçabilité de l'info.

5- Le nouveau métier des journalistes : vérifier et trier mais aussi animer des communautés. Et éduquer les internautes à la production de l'information. Sur Le Post, tous les journalistes animent et interagissent avec des groupes de contributeurs. 

6- La fin des médias ciblés? Plateforme, site communautaire, autant que média d'infos, le Post touche toutes les cibles, toutes les niches, tous les profils. C'est l'info qui vient toucher son lecteur (média des masses), pas le lecteur qui vient s'abreuver à un site d'infos qui lui ressemblerait (média de masse). 

Un an après, le Post s'installe durablement dans le paysage du web français. Il entre dans son âge de raison. Quels nouveaux territoires explorer?

En un an d'expérimentation, le mot "nous" a pris toute sa dimension. Réseau, communauté, conversation, nomadisation, ses déclinaisons ont pris la forme d'un véritable défi:

- Le Post doit rester un média accessible, mais il peut toucher tout le monde. Parler de tout,être une porte d'entrée de la richesse de l'info sur le Net,  même sur des sujets pointus. Et pour cela s'appuyer sur la puissance de la communauté.
- Le Post est donc un média d'infos qui s'appuie sur une communauté: quelles conséquences? Comment faire plus participer la communauté à l'identité du site, à son animation et à sa ligne éditoriale? Mais aussi à sa politique de modération?
- Enfin, quels nouveaux formats d'info pour demain? Nous en avons inventé beaucoup. Et cette année, nous avons fait de la vidéo une priorité: casser les barrières en revendiquant le zapping télévisuel comme un genre éditorial. Et nous venons d'inaugurer cette saison 2 par l'expérimentation d'une nouvelle forme de journal télévisé quotidien sur le web.
- Le mobile, évidemment. Le Post est nomade, une radio participative à laquelle on se connecte de partout. Une version mobile du site devrait sortir très bientôt... et faire parler d'elle...


- Vous pouvez également lire l'interview que j'ai donnée à Laurent François sur son blog "Citizen L." (merci Laurent)