jeudi 27 avril 2006

Le blog des blogs de la PQR

Pour vous faire une idée de la contribution des rédactions de la presse quotidienne régionale à la blogosphère, allez faire un tour sur ce blog d'agrégation, encore en béta (ici).
L'initiative est du SPQR (syndicat de la PQR). L'objectif semble être de montrer la vivacité - certes, encore timide - des quotidiens locaux dans ce domaine.
On pourra y suivre au jour le jour les posts rédigés par les rédactions d'une dizaine de journaux, et les commentaires de leurs lecteurs.

Vous pouvrez lire ici ce qu'en pense Luc Legay, le concepteur du blog.

(merci à Hubert pour l'info)

La Voix du Nord passera au tabloïd le 4 mai

Après Nice Matin il y a quinze jours, c'est au tour du grand quotidien régional du Nord de la France, "La Voix du Nord" (292.855 exemplaires) et de son petit frère "Nord Eclair" (31.578 exemplaires) de changer de format. Le groupe a fait le choix d'adopter le format tabloïd pour ses deux quotidiens, mais avec des formules légèrement différentes, réalisées par le cabinet Rampazzo. "Une" et design plus nerveux et urbains pour Nord Eclair (avec notamment un bandeau central au dessus de la pliure, avec un titre sec, pour les infos régionales), style plus classique pour Nord Eclair, mais cohérent et clair.
L'ouverture se fait sur une double page régionale, type "fait du jour", en noir et blanc. La petite locale suit, avec des articles plus courts et des infos services bien indentifiées et mises en valeur dans la page. "Un journal plus pratique et rapide à lire", annonce le journal sur son site Internet (ici)
On est loin des articles flottants et brouillons de Nice Matin. On sent l'affirmation de choix rédactionnels : un quotidien tourné vers sa région et les sujets de proximité.
Quelques remarques :
- malgré l'habillage élégant et ludique, la quasi-totalité des pages est en noir et blanc, notamment les pages locales. La quadri semble avoir été réservée à une poignée de pages région et aux pages loisirs. Quand on sait que le coeur d'un quotidien régional est justement la locale, le "choix" suprend un peu. Mais «après le 4 mai nous allons préparer la modernisation industrielle du groupe pour, à l'horizon 2009-2010, passer à des journaux tout en couleur», a indiqué à l'AFP le directeur général de la Voix du Nord Jacques Hardouin.
- peu d'innovations : ce n'est pas une critique, juste un constat. Le journal a fait le choix de ne pas bouleverser les habitudes de ses lecteurs, ce qui n'est pas une mauvaise stratégie.
- sur Internet, la nouvelle formule est présentée assez clairement, avec des pages en format Pdf à télécharger et surtout un forum pour accueillir les réactions et les critiques des lecteurs (qui sont plutôt positives pour l'instant).
Toujours à propos d'Internet, les deux quotidiens annoncent une "nouvelle formule" de leurs sites le 4 mai, avec l'apparition de blogs. Ce qui est plutôt encourageant. Jacques Hardoin (lire son interview ici), affiche néanmoins un certain nombre de réserves sur le sujet :

« Internet est un moyen complémentaire de s’informer. Le grand risque, c’est que les informations que l’on y trouve ne sont pas toujours contrôlées. Avec les blogs et les forums, on peut mettre en ligne ce qu’on veut. Toutes les dérives sont possibles et imaginables. Là aussi, c’est important que des journalistes aient vérifié cette information, qu’ils l’enrichissent de liens, et la complètent avec une galerie de photos. »
Parallèlement, il continue de croire en l'avenir de la presse quotidienne régionale. "La Voix du Nord" encaisse pourtant une érosion régulière de ses ventes (-1,57%) , comme la plupart des titres de la PQR, mais le directeur général de la Voix du Nord préfère insister sur le fait que
"l’ensemble de la presse quotidienne régionale française est repassé au-dessus des 18 millions de lecteurs réguliers. Ce chiffre montre une augmentation par rapport à 2004".
Il s'agit en fait de résultats tirés d'une étude d'Epic à partir d'un échantillon (que l'on peut consulter en Pdf ici), mais qui ne correspondent pas aux chiffres de diffusion des quotidiens régionaux (5,82 millions de journaux vendus chaque jour) qui, eux, sont en baisse ( de -1,5 en 2005) :

"Depuis 1990, la diffusion payée de l'ensemble de la PQR a baissé de 10,5 %, soit plus de 660 000 exemplaires payés perdus. Le plus inquiétant est qu'une accélération s'est produite dernièrement. Ces deux dernières années, la baisse a atteint 2,6 % (près de 180 000 exemplaires payés). " (étude Eurostaf 2004)


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Références : présentation de la nouvelle formule de la Voix du Nord (ici) et de Nord Eclair (ici). Sur la crise de la PQR, lire mon post (ici) mais également le dossier de Stratégies de novembre 2005 (ici).

Les deux quotidiens appartiennent au groupe Voix du Nord, qui a été racheté en août 2005 par le groupe belge de presse Rossel à la Socpresse.

mercredi 26 avril 2006

Grandes villes : la "wification" est en route

Le maire de Paris veut faire de la capitale française "la seconde ville à proposer du Wi-Fi gratuit à ses habitants". Le 21 avril dernier, Bertrand Delanoë et son homologue à San Francisco ont signé une convention "villes numériques".
A San Francisco, Google et Earthlink sont en effet en train d'installer l'un des premiers réseaux Wi-Fi gratuit de la planète couvrant l'ensemble de la ville (même s'il y a aujourd'hui des doutes sur la gratuité du service, lire ici). Le système existe déjà en Floride, dans la ville de Saint-Cloud (lire ici).
A Portland, la municipalité va également proposer du Wi-Fi à l'ensemble de ses habitants. C'est la société MetroFi qui a remporté le marché (lire ici).

"Le PDG de MetroFi, Chuck Haas, prévoit que toutes les grandes métropoles
américaines auront leur réseau Wi-Fi municipal d'ici 5 ans.
"
La grande "wification" est en route. A moyen terme on peut donc imaginer qu'en France, dans les grandes villes, on pourra se connecter à Internet depuis n'importe quel terrasse de café ou arrêt de bus. On pourra aussi téléphoner "gratuitement" grâce à la Voix sur IP qui se développe sur les mobiles (avec la création des téléphones hybrides WiFi/GSM).
Ce qui signifie que l'on pourra également accéder à des news là où l'on lisait habituellement son journal. Une bonne nouvelle pour ceux qui investissent aujourd'hui dans le papier électronique (le journal sera réactualisé via Wi-Fi) ou qui proposent déjà la publication électronique de leur quotidien sur les PDA et les smartphones.

(Sources : Canard Wifi et NetEco)
(Lire également cet article de Techcrunch sur la stratégie Wi-Fi de Yahoo)

mardi 25 avril 2006

Qu'est-ce que le Web 2.0 ?

Tout le monde en parle, mais savons nous précisément quels outils et pratiques recouvre ce terme ?
Le journaliste et universitaire Francis Pisani s'est essayé à une définition du Web 2.0, que je vous invite à lire ici, ici et .

(Lire également la traduction du texte fondateur de Tim O'Reilly, sur Internet Actu)

Ces citoyens qui font peur aux journalistes

Petit exercice : trouvez vous une assemblée de journalistes, et parlez leur de ce qui se passe aujourd'hui sur Internet, les blogs, les moblogs, les podcasts... Il y aura toujours un petit groupe (généralement au fond de la salle) pour lancer "oui mais alors si on laisse tout le monde jouer aux journalistes, maintenant, c'est la porte ouverte à toutes les dérives"...
Internet ne fait pas peur qu'au ministre français de la Culture (ici). Il fait aussi peur à bon nombre de mes confrères. Pour preuve, le reportage diffusé lundi soir sur la chaîne française Canal+ : "Tous reporters: la fin des journalistes ?". Mes confrères de "90 minutes" sont allés rencontrer quelques incontournables de ce phénomène qu'on appelle le "citizen journalism", promoteurs ou détracteurs : Dan Gillmor (auteur de "We the media"), le blogueur Loïc Le Meur, un responsable de la BBC , Bruno Patino du Monde.fr (l'auteur de "Une presse sans Gutenberg"), ou encore le patron d'Agoravox (le site d'infos rédigées par des citoyens). Le documentaire explique assez justement comment Internet et surtout le téléphone portable permettent au citoyen lambda, au témoin en fait, d'être le premier sur l'info et de pouvoir la diffuser instantanément, puisque si aucun média ne lui porte d'intérêt, il lui suffit de créer son blog.
Il y a également cette jolie phrase de Dan Gillmor: "Je pars toujours du principe que mon lecteur en sait plus que moi".
Curieusement, le reportage embraye assez vite sur les"dérives" du phénomène : des amateurs jouant aux Paparazzi (les "Snaparazzi"), ou encore le "happy slapping" (des jeunes qui se filment en train de gifler des inconnus et partagent leurs "exploits" sur le Net) et les snuff movies sur téléphone portable (on se filme en train de violer ou tuer). Le tout ponctué de mises en gardes de journalistes sur l'absence de filtres et de contrôles. Et le responsable du festival Visa Pour l'Image de Perpignan (merci Gilles, pour la correction) d'expliquer que le phénomène du "tout le monde photographe" serait en train de tirer l'information vers le bas.
Très curieux...
Evidemment, comme le rappelle Bruno Patino dans le reportage "journaliste, c'est un métier. C'est comme si tout le monde décidait de se déclarer médecin..."
Il y a effectivement une méthodologie spécifique au journaliste face à l'information, une déontologie également. Il y aussi des dérives. Je suis toujours surpris de ce besoin qu'ont certains de mes confrères de rappeler ces évidence.
Si le journalisme est évidemment un métier, cela ne signifie pas qu'il est tout seul dans la galaxie de l'information.
Il l'était avant. Il ne l'est plus aujourd'hui. Les règles du jeu ont changé. Et le métier aussi, en conséquence.
Les "lecteurs" ne veulent pas (tous) supprimer ou remplacer les journalistes. Ils veulent avant tout participer à la production de l'information. Ils veulent aussi pouvoir hériarchiser l'info et pouvoir en parler. Ils veulent... et ils peuvent désormais le faire.
Ils se passeront donc effectivement des médias (pas forcément des journalistes) si ces derniers ne leur permettent pas de participer.
La future "Presse 2.0", qui découle de l'Internet 2.0 (Internet interactif), doit donc se bâtir autour de ces quatre axes : participation, conversation, personnalisation et ce que j'appelle "l'information sociale" (l'info que l'on partage et qui rapproche les gens).
Partager pour optimiser l'efficacité, c'est l'essence même de l'Internet (le seul univers où le fait de copier est considéré comme une qualité !).
S'ils veulent continuer à jouer sur le terrain de l'information, les journalistes traditionnels vont devoir apprendre à partager... et à cohabiter.

lundi 24 avril 2006

eBay veut s'allier à Yahoo ou Microsoft contre Google

Le géant de la petite annonce gratuite sur Internet a peur de Google. Avec "Google Base", toujours en version béta, le maître du moteur de recherche menace directement les plates bandes d'eBay (lire ici le test du service par "l'Atelier").
Selon le Wall Street Journal, eBay aurait engagé des discussions avec les deux autres mastodontes du Net, Yahoo et Microsoft, en vue d'une potentielle alliance. Objectif : contre l'ascension irrésistible de Google.
"Après des années de collaboration étroite avec le moteur de recherche,
l'année dernière a vu Google attaquer plusieurs de nos branches d'activités",
peut-on lire dans le Wall Street Journal.

Lancé en novembre dernier en version béta (test), le nouveau service "Google Base" permet aux internautes et aux professionnels de publier gratuitement et librement n'importe quel contenu:
"Google Base se présente comme une gigantesque base de données permettant à
tout un chacun, particulier ou entreprise, de mettre en ligne les contenus de
son choix. Pour chaque contenu mis en ligne, une page de présentation disposant
de sa propre adresse (URL) est générée automatiquement. Offres d'emploi,
annonces immobilières ou automobiles, appels d'offre, recettes de cuisine, cours
universitaires ou oeuvres caritatives : tout peut - et doit, selon Google -
transiter par Google Base."

Autrement dit, Google est en train de se constituer une gigantesque base de données de tout ce que les gens ont à partager et à vendre sur Internet. Du "tout sur tout", qui dépasse le cadre de la petite annonce pour venir affiner les ambitions "local search" (recherche locale d'infos et de services) du moteur de recherche :

"L'ambition de Google est de mettre rapidement et simplement ceux qui
recherchent une information ou un produit avec ceux qui la ou le proposent. Tout
va dans ce sens : une page Web par produit, une adresse email dédiée valable le
temps que l'annonce est en ligne, l'incorporation d'une vignette Google Maps
pour situer le vendeur potentiel, etc. Aller plus loin dans la recherche
d'information, dépasser le modèle actuel de l'indexation et du référencement par
les robots et... la possibilité d'engranger de prodigieuses recettes. "


Il n'y a pas qu'eBay qui devrait s'inquiéter.

(Sources : Génération NT et l'Atelier)

dimanche 23 avril 2006

El Pais invente le journal qui ne boucle jamais

L'initiative est "sans précédent dans le monde" annoncent les responsables du quotidien national espagnol. "El Pais" lancera demain sur Internet "un journal imprimable gratuit actualisé en continu".
"24 horas" (24 heures), c'est son nom, sera édité sur la base du contenu de l'édition en ligne du journal "ELPAIS.es" (qui publie les articles des journalistes "print" et "web" du quotidien, ainsi que des dépèches d'agence).
Mais "24 horas" ne bouclera jamais. Le contenu évoluera avec l'actualité, et les internautes pourront télécharger (8 à 16 pages en format Pdf) puis imprimer leur journal à n'importe quelle heure.
Il y aura cinq "versions" personnalisées du journal : "une sans publicité pour les abonnés, une édition générale et trois thématiques (Espagne, International, Economie)".¶

L'initiative est intéressante, même si ce n'est pas la première fois que l'on s'interroge sur l'intérêt de donner la possibilité aux lecteurs d'imprimer le journal directement chez eux. Reste à savoir si la piste est la bonne. Pourquoi imprimer sur 16 feuilles A4 volantes ce qu'on peut lire sur l'écran ?
L'expérience sera, à mon avis, plus probante avec l'arrivée du papier électronique (lire mes précédents posts sur le sujet ici et ).

Quoi qu'il en soit, El Pais a le mérite d'essayer, et de chercher à innover en permanence. La version en ligne du quotidien est l'une des plus novatrice de la presse quotidienne mondiale, avec celle du Gardian.

(Source AFP)

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El Pais fait partie du groupe Prisa qui contrôle également la radio Cadena Ser, la télévision CNN+, et Prisacom (spécialisé dans le développement de contenus digitaux).

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MISE A JOUR : "24 Horas" est donc sorti lundi. Lire ici le commentaire de Gilles Klein sur son blog, et ici celui de Philippe Gammaire sur le sien)

vendredi 21 avril 2006

45% des internautes américains utilisent Internet pour des décisions "majeures"

C'est ce qui ressort d'une étude publiée par le Pew Internet and American Life Project (ici), reprise par "Le journal du Net" (ici). Sur ces 45% (60 millions d'Américains) :

54% d'entre eux déclarent qu'Internet leur a permis d'aider une autre personne à se sortir d'une maladie grave. 50% d'entre eux l'ont utilisé pour trouver une formation. 45%, l'ont utilisé pour prendre d'importantes décisions financières, 43% pour trouver une nouvelle maison, 42% pour trouver un nouvel établissement scolaire pour leurs enfants ou pour eux mêmes, 23% pour acheter une voiture, 14% pour changer d'emploi...

Ce qui montre la place de plus en plus importante que prend Internet dans les actes de la vie quotidienne des internautes.

La hausse de la pub locale en ligne profite aux moteurs de recherche

A lire sur MEDIA CAFE: "US : le montant de pub locale dépensé en ligne devrait atteindre les 5,8 milliards de dollars"

mercredi 19 avril 2006

"Greblog", un blog hyperlocal à Grenoble

Lancé il y a un mois, le blog "indépendant de la ville de Grenoble et de ses alentours" rencontre déjà un petit succès. "10.000 visiteurs en 31 jours", se réjouit Chrys, l'un des fondateurs de ce site français d'infos hyperlocales. "Greblog/ MonGrenoble totalise en moyenne 221 visiteurs/jour pour le moment", et brosse l'actualité de la ville plusieurs fois par jour (sports, culture et proximité), mais ne propose pas d'infos pratiques ni d'agenda. Et ne traite pas les faits divers (ce qui nécessiterait une structure professionnelle pour organiser les tournées).
La "rédaction" est composée de "journalistes citoyens" dont l'objectif est de susciter le débat et la discussion sur des sujets locaux, mais aussi de générer une "info partagée" (à travers notamment des outils wiki et les réseaux de blogs locaux).

Le réseau des blogs hyperlocaux français s'agrandit donc, et continue de grignoter les terrains laissés vierges par la presse quotidienne régionale sur le Net, notamment celui de la discussion. En voici une petite liste, non exhaustive (laissez moi un commentaire si vous en connaissez d'autres) : "Mon Puteaux" (un ancien journaliste, militant socialiste), "Mon Neuilly" (par l'auteur de Mon Puteaux), "Le Romanais" (indépendant), "Mon Orléans" (militant), "Mon Toulouse" (militant), "Le Rouennais" (indépendant), "Mon Aulnay" (indépendant), "Cap-Ferret Blog" (indépendant), "Colomblog" (indépendant).

C'est plutôt rafraichissant, ça fait un peu penser aux débuts de la radio locale en France dans les années 80, avant que les stations se professionnalisent et se formatent.
C'est aussi le signe que l'info locale gratuite, jusque là absente sur le Net, commence à se développer naturellement, malgré l'absence de véritable modèle économique.

Pendant ce temps, la PQR hésite encore à ouvrir les vannes de son "trésor de guerre" sur Internet. Car il y a véritablement un trésor de guerre (plusieurs centaines d'articles de petite locale publiés chaque jour, mais surtout des milliers de correspondants locaux en prise directe avec l'actualité de leur commune).

Je ne suis pas loin de penser que la presse quotidienne devra passer par une sorte de "lacher prise", pour oser croire qu'elle peut exister en dehors du papier...

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Et merci à Chrys pour m'avoir mis en lien sur son blog :)
(... et à Hubert et Jeff pour avoir complété la liste)

mardi 18 avril 2006

Citizen journalism : Dan Gillmor's Bayosphere devient Backfence

Dan Gillmor se retirant du projet (lire mon précédent post sur le sujet ici), on s'inquiétait de l'avenir de l'expérience "Bayosphere". On y voyait même un mauvais présage pour l'évolution du "citizen journalism", terme très en vogue pour désigner la participation des "citoyens" à la production de l'information.
Pour rappel, "Bayosphere" (on peut toujours accéder à l'ancien site ici) était le site hyperlocal rédigé par et pour la communauté de la baie de San Francisco. C'était également l'une des pierres de construction du grand dessein du "pape" du citizen journalism, Dan Gillmor (l'auteur de "We the media"). Mais en janvier dernier, Gillmor tirait un bilan plutôt négatif de son expérience. Annonçant sa volonté d'abandonner l'aventure (lire à ce propos le billet de Francis Pisani du 25 janvier, ici), il évoquait les difficultés qu'il avait à bâtir un modèle industriel et économique autour de son projet.
Dan Gillmor, qui a décidé de se consacrer à la création de son "center for citizen media" (une association à but non lucratif dont le but est d'aider et de former les citoyens aux pratiques journalistiques) a donc finalement cédé "Bayosphere" à la société "Backfence.com". Dans son blog (ici), qu'il continuera de publier sur le site de Backfence, Gillmor se réjouit de cette transition, tirant les leçons de son "échec" : Nous avons été plus "global" que "local", explique-t-il en substance, les internautes passant plus de temps à parler de l'Irak qu'à échanger des infos locales utiles à la communauté.
Backfence, qui possède déjà plusieurs sites du même genre dans la région de Washington DC, devrait donc combler cette lacune. La société est justement "pionnière" dans l'information hyperlocale, explique Gillmor. Le rachat de Bayosphere, qui va être relooké et réorganisé selon le modèle "Backfence" (voir ici), est donc plutôt une bonne nouvelle pour l'avenir du citizen journalism local, preuve que l'on peut bâtir des modèles économiques autour de ce type d'expérience à condition de rester local, justement... et utile.
Et en jetant un coup d'oeil aux sites de Backfence, on se dit en effet qu'il y a sans doute quelque chose à faire dans le domaine: "infos" hyperlocales, partages de photos, trucs et astuces, coups de pouce, petites annonces, pages jaunes commentées par les internautes (ce restaurant est pas mal, mais leur plat du jour est à éviter etc.)...
Les sites sont vivants, mais les infos partagées tournent plus autour de la conversation et de l'info pratique (échanges d'idées, de bonnes adresses, ventes de particulier à particulier) que des news proprement dites. Je n'ai pas trouvé de rubrique faits divers, par exemple, à part un article de quelques lignes sur le site d'Arlington où un citoyen se demande ce que font les policers stationnés sur la route 66, "does everybody knows ?", ce à quoi un autre citoyen répond qu'il les a vus lui aussi...). Et la rubrique "politique locale" est restée désespérement vide.

Je finalement trouve plus convaincantes les expériences d'infos hyperlocales ouvertes à la conversation, mais construites sur un squelette de news émanant des journalistes professionnels, associées à celles des habitants de la commune (c'est le postulat de Wicked local, par exemple).
Je ne vois pas l'intérêt du "tout citoyen" (comme du "tout journaliste", d'ailleurs). Journaliste ou citoyen, peu importe : l'essentiel est que l'info soit diffusée et qu'elle soit utile. L'important, c'est finalement la qualité et la quantité d'informations que l'on sert à la communauté. Tout le reste n'est qu'idéologie.

(Sources: Editors Weblog, "Backfence Bay Area")

lundi 17 avril 2006

Reuters s'ouvre aux blogs

L'agence de presse britannique Reuters a passé un accord avec Global Voices Online, une organisation à but non lucratif dont l'objectif est de promouvoir la parole des blogueurs et des médias citoyens.
Reuters publiera donc sur son site des informations émanant de blogs clairement identifiés, ou placera, à la fin de ses dépêches, des liens vers des blogs traitant du même sujet.

Dean Wright, Reuters' global managing editor for consumer services : "There are a lot of conversations going on around news these days and we want to tap into that."
Créé par le "Berkman Center for Internet Society" à Harvard, Global Voices Online sélectionne les blogs, podcasts et photos (sur les sites de photos partagées) les plus populaires. Leur objectif "traquer les conversations" dans le monde. En gros : de quoi parlent les gens en ce moment, dont les médias ne parlent pas (ou pas comme eux) ?

(source : Gardian Unlimited)

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Reuters co-organise avec le "Media Center" et la BBC le "We Media Global Forum", les 3 et 4 mai prochain à Londres. Il y sera question des médias du futur, des innovations menées ou à mener dans ce domaine et de citizen journalism. Parmi les participants : Jeff Jarvis, Dan Gilmor, et des représentants des principaux médias et acteurs de l'Internet (Al Jazeera, Le Monde, The Gardian, BBC, Google, Technorati...)

mercredi 5 avril 2006

Le boom des éditions électroniques des quotidiens américains

Le nombre de leurs lecteurs en ligne a augmenté de 21% en 2005, tandis que le nombre de pages vues progresse de 45% sur la même période.. 55 millions d'internautes américains lisent les quotidiens en ligne, chaque mois.
Une précédente enquête (lire ici) révéle que 46% des internautes américains s'informent à grâce aux sites des télévisions nationales, 36% passent par les moteurs de recherche, 32% par les sites des quotidiens régionaux, 31% par les sites des télés locales et 32% par les sites des quotidiens nationaux.


(sources : Journal du Net et Pew/Internet)

mardi 4 avril 2006

Gratuit / Payant : quel est le bon business model ?

Presse écrite ou sur Internet, le débat est loin d'être terminé. Les modèles économiques en sont encore au tatonnement.
En Juin prochain, à Moscou, la World Association of Newspapers se fera l'arène de ce débat en invitant lors de son colloque annuel deux papes du payant et du gratuit (lire ici). D'un côté, Mathias Döpfner, le PDG d’Axel Springer, le plus grand groupe de presse allemand (Bild, Die Welt...), viendra expliquer que le modèle économique des quotidiens gratuits est voué à l'échec :

"M. Döpfner pense que les médias traditionnels sont menacés par le vieillissement de la société et la désaffection des jeunes lecteurs au profit des médias numériques. Mais les journaux gratuits ne sont pas la réponse. Dans une présentation intitulée "L’avenir des journaux : le journal de l’avenir", il suggérera des moyens de sortir de la "supposée crise de la presse" - en imbriquant étroitement les activités en ligne et imprimées et en lançant de "bons vieux journaux", comme Welt Kompakt, publié par le groupe en Allemagne.
M. Döpfner interviendra dans la session "Les Innovateurs en matière de produits," qui examinera comment les éditeurs déclinent la marque du journal principal pour créer une plus large gamme de produits imprimés, ciblant de nouveaux segments du marché et générant des revenus supplémentaires."
En face, Pelle Tornberg, Directeur exécutif de Metro International, le géant des quotidiens gratuits, viendra prècher exactement le contraire :

"Il estime en effet que les quotidiens gratuits remplaceront un jour leurs homologues payants les jours de semaine, et que 95 % des titres payants "survivront" sous forme de produits de niche que les lecteurs achèteront uniquement le week-end."

Sur Internet, les avis sont aussi partagés. Faire payer l'accès au site du quotidien (Le Parisien), faire payer une partie de l'info à travers un service premium (Le Monde) ou offrir l'info locale en continu sans rien faire payer (La dépêche du midi).
Chacun a ses papes, et le peu de chiffres significatifs qui circulent aujourd'hui tendent à prouver qu'aucun business model n'est capable de convaincre définitivement.
A tel point que l'American Press Institute a lancé l'an passé un programme de deux millions de dollars pour chercher et tester les business model de la presse de demain (voir le projet "Newspaper Next", ici).
Leur point de départ est intéressant. Plutôt que de se dire "les gens auront toujours besoin de la presse écrite", point final... ils renversent la réflexion: intéressons-nous librement aux nouveaux modes de vie des consommateurs et donc à leur nouveau "régime d'information". De quel type de produit d'information ont-ils besoin, et quand et comment ? Et créons un modèle à partir de ça :
Clark Gilbert,professeur à Harvard et directeur de la boîte de consulting Innosight : "I have no more important piece of advice for this industry than to bring in the non-consumer and build a newspaper model around them" (aller chercher le "non consommateur" et construire un modèle de presse autour de lui)
Ce qui veut dire que la question fondamentale n'est pas tant : faut-il vendre ou "offrir" nos produits (financés par la pub) que : de quoi ont besoin les consommateurs d'infos aujourd'hui ? S'il y a un besoin et une réponse adaptée, alors il y a un modèle économique.

Le business model Internet de la presse aujourd'hui est finalement aussi vieux que le commerce tunisien : il consiste d'abord à rendre service et à attirer les consommateurs chez soi. De les inviter à "vivre" et à circuler dans ses rayons et ses rues, même quelques secondes, un peu comme un supermarché ou une place publique dans une ville. Devenir un supermarché de l'information, ou, au moins (l'internaute étant de plus en plus nomade et fragmentaire), y participer. Devenir indispensable, surtout.
Tout ça démarre forcément par une base de gratuit, à équilibrer, sachant que le gratuit est irréversible (les enquêtes montrent que les Internautes refusent de payer ce qu'ils avaient gratuitement auparavant). mais qu'il génère une activité et une circulation. Une fois dans la place, l'internaute (à condition qu'on lui permette d'interagir), consomme naturellement d'autres services d'information ou commerciaux... gratuits ou payants (surtout gratuits, d'ailleurs). A partir de là, le business model est plus "facile" à composer et à recomposer en fonction du marché (on paie ce dont on a besoin et qu'on ne trouve pas ailleurs, ou pas assez vite ailleurs... et ce jusqu'à ce qu'on le trouve ailleurs). L'essentiel est d'abord de générer du trafic et de l'activité. Puis de savoir l'exploiter.