samedi 11 mars 2006

L'important c'est d'en parler

Dan Gilmor, pape du citizen journalism (et fondateur du center for citizen media) lors du congrès 2006 du "Online Journalim Review" de Los Angeles (ici):
"Si vous provoquez un niveau suffisamment approfondi de conversation à propos d'un sujet restreint, vous avez un business."
Ce qui veut dire que, quel que soit le sujet, l'important, c'est qu'on en parle.

Cela me fait penser à de nombreuses discussions que j'ai eue à propos de la définition de l'information, du fait et de l'événement, et de tous ces événements de la vie qui touchent les individus et dont nous ne parlons jamais dans les médias parce que nous n'avons pas créé les outils pour les détecter (je suis en train de travailler sur ces outils à inventer).

Parce qu'il y a effectivement une différence majeure entre ces trois notions : info, événement, et fait. Un fait est un fait. Il survient, avec ou sans témoin direct. L'événement, lui, survient généralement après, mais pas toujours. Un événement en est un à partir du moment où d'autres personnes que les protagonistes sont au courant... et en parlent. L'info, elle, survient avant ou après l'événement. L'info, c'est la façon dont un "média" certifié formule et définit l'événement ou le fait qui lui a été rapporté. Parfois l'info survient sans qu'il n'y ait de fait : dans le cas d'un mensonge, ou d'une info basée sur une rumeur. C'est alors elle qui génère l'événement.
Bref, l'événement nait de la conversation, qu'il y ait un fait ou non. L'information est à la fois ce qui formalise et nourrit l'événement.

Le sociologue Pascal Froissart m'expliquait il y a quelques semaines, à propos de la presse à scandales, que l'important pour elle, n'était pas que l'info soit vraie ou fausse, mais que l'on puisse en parler devant la machine à café.

Tout cela nous dit trois choses :

- il y a des tas d'événements qui surviennent dans la vie des gens, mais qui n'accèdent jamais au statut d'information.
- ce qui n'empêche pas les gens d'en parler. Devant la machine à café... mais surtout sur Internet
- avec Internet, l'événement n'a plus besoin de passer par le filtre d'un média traditionnel pour devenir une information. Il suffit que suffisamment de personnes en parlent.

Le média traditionnel peut intervenir pour certifier cette information. Mais peu importe... La conversation a précédé l'information. Or, l'important, c'est qu'on en parle.

Pour rester dans la sphère de proximité du lecteur, le média doit donc pouvoir se brancher sur cette conversation le plus tôt possible.
- Soit directement, en créant des outils lui permettant de faire émerger et de collecter les conversations (le "citizen journalism" via Internet est un moyen, mais pas suffisant, d'autres outils sont nécessaires).
- Soit indirectement, en mettant automatiquement l'usager en contact avec l'événement censé lui être proche (sans intervenir sur la qualité de cet événement...)
- Soit les deux, évidemment.

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