vendredi 28 juillet 2006

Rendez-vous à Biarritz

Petite pause estivale pour ce blog. Je prends quelques semaines de congés histoire d'aller surfer ailleurs que sur le web.
Je serai présent à Biarritz du 24 au 26 août pour participer aux "Rencontres médias et proximité". Je dois intervenir sur "l'impact économique et éditorial des nouvelles technologies sur la communication de proximité", vendredi à 14h30. Le programme complet est ici. Le blog des rencontres est .
Je serais également présent au pot organisé par Joël Ronez (ici). Pour ceux qui souhaiteraient nous y rejoindre.

Bonnes vacances à vous tous :)

(Et pour ceux qui restent au bureau ce mois-ci, l'adresse du meilleur jeu web du monde histoire d'oublier le stress...)

Le Monde perd de l'argent, sauf sur Internet

Dans un entretien accordé aux Echos du 27 juillet, le président du directoire du Monde Jean-Marie Colombani prévoit une perte nette de 8 à 10 millions d'euros pour son groupe en 2006. Les pertes prévues pour le quotidien Le Monde ne devraient pas dépasser les 4 millions d'euros. Par contre Internet va très bien. Le Monde Interactif "devrait dégager 1,5 million de profits pour des revenus de 10 à 11 millions d'euros".

(Source : Tout sur la com)

Qui sont les journalistes blogueurs ?

A lire sur "Blognalisme" (ici) le résultat d'un sondage réalisé auprès d'une trentaine de journalistes blogueurs. "60% de l’ensemble des journalistes admettent également avoir consulté des blogs pour compléter des sujets qu’ils étaient occupés à traiter". Un tiers de ces blogueurs affirme ne s'être jamais censuré, mais 56% reconnaissent le faire parfois.
La plupart d'entre eux bloguent pour le plaisir en dehors du temps de travail, ou pour trouver une nouvelle audience. 12% le font parce qu'ils se sentent coincés dans la ligne rédactionnelle de leur média.
Enfin "si plus de la moitié de ces journalistes blogueurs estiment que, de manière globale, le média le plus intéressant est la presse écrite (probablement parce que la majorité de nos interlocuteurs sont issus de la presse écrite), elle est suivie immédiatement par un tiers d’entre eux qui pensent que c’est sur les blogs que les informations sont les plus intéressantes - avant la radio (6,3%) et la télévision (3,1%)".

France : le Net capte 9% des investissements publicitaires

Près d'un milliard d'euros au premier semestre 2006, soit une explosion de +52% par rapport à 2005, les nouveaux chiffres de l'e-pub en France vont faire réflechir les patrons de presse cyber-réticents.
Selon une nouvelle étude, publiée par l'IAB FRance, "la part de marché du Net dans les investissements plurimédia bruts atteindrait 9%", constate le Journal du Net (ici).
Ces résultats, plus exhaustifs, complètent les chiffres publiés par TNS il y a une semaine qui annonçaient une part de marché de 7,1% avec 748,8 millions d'euros d'investissement online bruts. La nouvelle étude prend en compte un périmètre plus large et comptabilise 984 millions d'euros d'investissement pour le premier semestre. L'an dernier, la part de marché d'Internet était de 5,9%, avec une croissance des investissements bruts de +74% .

Avec 9% de parts de marché, le Net reste en cinquième position, loin derrière la presse papier (magazines compris) avec ses 33,7% de parts de marché, et la télévision (29,3%), mais dépasse la presse nationale.

Les sites qui enregistrent les recettes brutes les plus importantes sont les moteurs de recherche (25%), les fournisseurs d'accès à Internet (22%) et les sites d'information et d'actualité (14?5%). Mais les deux premières catégories (moteurs et fournisseurs d'accès) ont réduit leur part de marché (47% contre 64% en 2005).

Selon l'IAB, "ce sont les PME qui constituent le prochain réservoir de croissance. Disposant de moins de budget que les gros annonceurs plurimédia, le Web représente pour elles une réelle opportunité".

Par ailleurs, les sites Internet connaissent une croissance de +20% depuis le début de l'année (+5,4 entre mai et juin 2006).


(Source: Journal du Net)

jeudi 27 juillet 2006

Média Café: PQN - PQR : quelques chiffres pour aider à la réflexion

Jeff Mignon ("Média Café") enrichit le débat engagé sur le blog d'Emmanuel Parody (ici) et sur "Demain tous journalistes" (ici) en livrant un catalogue de chiffres clefs sur la presse quotidienne nationale et régionale (ici).
Des chiffres qui confirment l'effet ciseau entre coûts de production et recettes, avec un bémol, comme je l'indiquais, pour la presse quotidienne régionale française qui a vu son chiffre d'affaires et ses recettes publicitaires augmenter. Positif, certes, mais pas rassurant pour autant, la publicité locale sur le Net n'en est encore qu'à ses balbutiements en France.

mercredi 26 juillet 2006

Quand les journaux ne pourront plus imprimer

Histoire de poursuivre la réflexion engagée dans mon précédent post (ici), je vous conseille de lire celui d'Emmanuel Parody (ici). Emmanuel cite un article de Scott Donaton sur Advertising Age (ici, en anglais, repris par Publishing 2.0) qui présente un scénario pour la fin des journaux papier. Les auteurs reprennent ce que je décrivais ce matin : c'est à dire l'effet ciseau entre des coûts de production de plus en plus élevés, et une progression des revenus pas assez importante. Je dis "pas assez importante", plutôt que déclinante parce que, en terme de publicité, la courbe descendante proposée par Publishing 2.0 ne peut pas être généralisée. Si la diffusion est globalement en déclin, les revenus publicitaires du papier ne baissent pas partout (en France ils baissent dans la presse nationale mais augmentent dans la presse régionale). Ce qui est sûr, c'est que ces revenus ne disposent pas de marge de progression importante, en tout cas suffisante pour pallier la hausse de coûts et la baisse des ventes. C'est la seule marge pour l'instant, puisque peu de quotidiens (à part le Figaro cette semaine) n'osent augmenter encore un prix de vente déjà élevé.
Quoi qu'il en soit, un jour arrivera où la courbe des coûts croisera structurellement celle des revenus. "Même ceux qui pensent qu'un basculement du papier vers le modèle digital est inévitable dans le futur, ne veulent pas l'admettre parce que c'est encore trop risqué", analyse Scott Donaton "Ils veulent d'abord construire l'arche qui les guidera sans danger vers ce nouveau business model avant de risquer d'assécher leurs sources de revenus actuels".
Ce ne serait donc qu'une question de temps. A peine cinq ans, calcule Publishing 2.0, pessimiste...
Pas sûr. Pas si vite en tout cas. D'abord parce qu'avant de tout lâcher et de basculer vers un business model tout neuf basé sur de nouvelles sources de revenus, on pourra sans doute déjà travailler sur les coûts de production et faire remonter la courbe malgré la baisse de diffusion (qui s'est ralentie ces dernières années). Par ailleurs, autant je pense que la focalisation sur le papier seul est un signe alarmant de faiblesse, autant je suis convaincu que la stratégie multi-supports est une force par rapport aux acteurs du Web.

mardi 25 juillet 2006

Jeunes : un lectorat pour demain ?

Une étude américaine de la "Newspaper Association of America Foundation" (lire ici) montre que 3 lecteurs habituels de journaux sur 4 (75%) avaient lisaient leur quotidien local au moins une fois par semaine quand ils avaient entre 13 et 17 ans. L'enquête a été réalisée auprès de 1600 lecteurs âgés de 18 à 24 ans.
"Cette étude est la première à valider le fait que non seulement les journaux sont dans la bonne direction lorsqu'ils cherchent à toucher les lecteurs de demain, mais qu'ils contribuent également à former une génération de citoyens informée et engagés dans le processus démocratique", traduit Margaret Vassilikos,senior vice-présidente de la NAA Foundation.
L'enquête de la NAA révèle également que les jeunes lisaient le journal parce qu'ils y trouvaient du contenu écrit spécialement pour eux (30%). Ce qui fait dire à Bruce Bradley, chairman de la NAA Fondation que "le contenu pour adolescents est un bon investissement pour l'avenir". 18% lisaient le journal local parce qu'ils connaissaient l'auteur de l'article ou parce qu'on y parlait de quelqu'un qu'ils connaissaient. Enfin 16% s'intéressaient aux infos concernant l'offre culturelle et de loisirs.
Je me souviens d'un focus group où deux jeunes lectrices d'un quotidien concurrent expliquaient qu'elles lisaient ce journal-là (et pas l'autre) par habitude, parce qu'il avait toujours été posé sur la table de leurs parents. Pourtant, elles reconnaissaient que l'autre journal, qu'elles ne lisaient pas, était plus "jeune" et de meilleure qualité. Mais elles n'avaient pas l'intention de le lire.

Rajeunir son lectorat, et surtout construire le lectorat de demain est un exercice optimiste mais compliqué pour un journal papier payant. En tout cas, il ne peut pas être le seul objectif. Les moyens dont disposent les journaux n'étant pas infinis -et le temps étant compté-, la question à poser est toujours celle du choix : faut-il dépenser son énergie et son argent pour amener les jeunes au journal papier payant ou faut-il essayer les suivre là où ils sont ?

Je comprends bien le souci des quotidiens régionaux payants de conserver un niveau de lectorat: lorsqu'ils passeront en dessous d'un certain seuil, ils n'auront plus les moyens de fabriquer le journal... en tout cas avec l'organisation actuelle des entreprises de presse.
L'optimisme est une belle chose, mais l'irréalisme est dangereux. On le sait : la presse écrite locale (la presse nationale est déjà dans le gouffre) devra forcément se restructurer socialement... et profondément. Parce qu'elle ne sera demain plus un média de masse et parce qu'elle dépense déjà aujourd'hui trop d'argent à payer des gens et des outils qui ne lui servent fondamentalement à rien.

Parlons donc d'avenir :
En France, 82% des 13-17 ans sont internautes (42% chez les adultes). Et il y a de fortes chances qu'ils le restent.
Selon une enquête de l'EIAA (European Interactive Advertising Association) les jeunes européens passent en moyenne 13h par semaine sur Internet (contre 10h pour les adultes). 48% surfent tous les jours.
En règle générale, l'utilisation d'Internet par les jeunes progresse plus vite que celle des autres médias. Même s'ils ont tendance à mixer les supports : 5% lisent parfois un journal papier quand ils sont connectés, mais 32% regardent la télé. Et lorsqu'ils sont devant la télévision, ils ont plus tendance à surfer sur Internet (28%) qu'à feuilleter un journal (24%). Même phénomène avec le téléphone portable : 38% déclarent l'utiliser pour aller sur Internet (et 29% parmi les autres ont l'intention de le faire, en France).
Par contre, 37% déclarent lire désormais les journaux en ligne plutôt que sur papier, tandis que 40% se déclarent prêts à payer pour du contenu spécifique et 22% pour des news sur Internet.
Les sites d'infos locales arrivent en 6e position derrière les e-mails, l'info générale, les sites musicaux, les téléchargements de musique et les sites de sport.
Bref, on voit qu'il y a évidemment de l'espoir. A condition d'accepter de changer. Et d'en payer le prix.

(Lire l'étude de l'EIAA ici)

lundi 24 juillet 2006

Time to money

Pour la première fois, la division digitale du groupe espagnol Prisa (le quotidien national El Pais) enregistre des bénéfices. Après avoir perdu 2,9 millions d'euros l'an passé, les bénéfices s'élèvent à 0,06 millions d'euros, avec un chiffre d'affaires en hausse de 47,3% (14,2 millions d'euros).
Vu l'explosion des investissements publicitaires en ligne et la progression du temps passé devant Internet, la question aujourd'hui n'est plus de savoir si les activités Internet des quotidiens seront rentables, mais quand elles leur feront gagner de l'argent.

(Source : Editors Weblog)

"Mettre le contenu du journal en ligne, c'est ce qu'il y a de moins intéressant pour le lecteur"

Ken Sands, le directeur de la version en ligne du quotidien régional américain "Spokesman-Review" (Etat de Washington) a tout compris. Il ne se contente pas de publier le journal sur le Net. Non seulement il entretient la conversation avec ses lecteurs à travers ses 35 blogs, mais il produit également du contenu exclusif au web pour compléter les articles de la version papier.
Or, constate Ken Sands, "depuis le début, nous nous sommes rendus compte que mettre le contenu du journal papier en ligne, était ce qu'il y avait de moins intéressant pour le lecteur. Bien moins important que ce que l'on peut faire avec Internet".

Et d'ajouter que les initiatives les plus simples étaient souvent les meilleures.
Pour le site
"culture/loisirs" du journal, plutôt que de se lancer dans du développement compliqué, il a choisi de créer une page MySpace (ici), laquelle est reliée aux pages des artistes locaux. Le journal propose aussi des podcasts hebdomadaires et le téléchargements des morceaux des groupes locaux.
Mais la clef du succès, poursuit Sands, c'est qu'il faut savoir agréger sur le site du journal des informations venues d'ailleurs. Tant que l'info est utile au lecteur, il ne faut pas hésiter à renvoyer ce dernier vers d'autres sources que la nôtre.
"L'ironie, c'est qu'il faut savoir faire partir le lecteur de votre site pour qu'il revienne plus facilement".
Jolie phrase. Pensez à l'inscrire quelque part...

(Source : Media Life Magazine)

vendredi 21 juillet 2006

Faut-il tuer les journaux payants ?

A lire, le post qui fait débat dans la blogosphère média cette semaine : l'analyse de Jeff Mignon (ici) sur l'avenir de la presse quotidienne payante en France. Pour Jeff, la presse papier payante n'est plus rentable.

"S'il n'y avait pas les banques ou de généreux investisseurs, la très grande majorité de ces grands noms de la presse serait rayée de la carte média. L'équation est simple : leur nombre d'acheteurs et leur chiffre d'affaires publicitaires ne suffisent pas à couvrir leurs coûts."

Et de proposer deux solutions : devenons un gratuit. Ou : "Arrêtons de payer des millions en papier, encre et distribution et devenons une entreprise web. Et, proposons une version papier sur mesure aux lecteurs attachés à cette forme de support et qui seront prêts à payer le prix fort pour ça."

Le problème est peut-être plus complexe.

Oui, la presse quotidienne payante n'arrive (globalemment) pas à faire d'argent avec son seul journal, mais elle en fait avec d'autres produits, d'autres supports. Surtout en presse régionale où l'on constate même parfois que les éditions qui perdent le plus de lecteurs sont parfois les plus rentables...

Alors, on pourrait se dire : supprimons le journal payant puisqu'il ne rapporte pas assez d'argent ! Mais on prend alors le risque de saborder la marque.
Or, les études montrent que (sur le plan local surtout), la marque de ces médias reste un atout essentiel pour construire le paysage multi-médias de demain.

Un média est un ensemble. Si le journal gagne de l'argent sur d'autres produits, c'est d'abord parce qu'il est ce média régional, ce quotidien papier qui anime encore le quotidien des habitants. Il y a un lien affectif, enraciné, entre les journaux et leur environnement. N'importe quelle entreprise rêverait de ce lien là.

Demain, sans doute, le journal papier disparaîtra ou sera gratuit. Mais pas aujourd'hui.
J'achète encore le journal, parce que quand je vais boire mon café, quand je prends le train, quand je me vautre sur mon canapé ou que je prends mon petit déjeuner, je trouve plus pratique, plus agréable de lire sur du papie, pour l'instant. Je ne vois pas l'intérêt de faire disparaître ma marque du bistrot et du métro.
Quant au gratuit, je suis d'accord avec toi. Je pense même que l'on a pas encore exploité tout le potentiel de ce modèle économique.

Mais il y a encore une place pour le journal papier payant, pour l'instant. Je dis bien pour l'instant. Il faut être pragmatique. Pas prophète. Tant qu'il y a un lectorat sur ce support, pourquoi s'en aller ? Faut-il faire du journal payant un produit de niche, comme le propose Jeff ? Demain, peut-être. Mais aujourd'hui ? Quand Ouest France (qui a stabilisé ses ventes) approche le million d'exemplaires, je ne pense pas que l'on puisse déjà parler de marché de niche.

En même temps, l'expérience de Tamedia à Zurich est intéressante. En pleine restructuration, le groupe a relancé l'entreprise en sortant un gratuit (20 minuten) et en ciblant les cadres pour son quotidien payant national, avec hausse du prix.

Le nouveau visage de la BBC


... et donc le visage du média de demain.

En haut, le schéma de la BBC d'avant. Et en bas, la nouvelle organisation interne du média. C'est à dire une structure complètement intégrée, qui ne fonctionne plus en secteurs cloisonnés (les pétales du premier schéma correspondaient à différents services), mais en un réseau interpénétrant, toute en transversalités.
C'est la vision du directeur général de la BBC, Mark Thomson, révélée hier (lire l'intégralité de son speech ici). Une vision à 360 degrés "pour un futur créatif".
La nouvelle organisation de la BBC se veut donc "une structure à 360 degrés, qui mette en réseau toutes les créativités (technologie et contenus) pour délivrer ce dont nous avons besoin aujourd'hui dans ce monde de convergence."
Bref, c'est un véritable "moteur d'informations". Une structure multi-médias, organisée en univers et en familles et non plus en produits, pour créer et penser les contenus simultanément sur toutes les plateformes (télé, web ou radio).
Un argument de plus dans le débat sur l'intégration des rédactions : faut-il intégrer Internet ou créer un service spécifique ? Pour la BBC, la réponse est évidemment l'intégration. Pour de nombreuses rédaction d'ailleurs, la création d'un service à part n'est qu'une étape obligée : répandre une culture multi-médias (car Internet n'est pas un nouveau support mais plutôt une nouvelle culture de convergence et de transversalité) avant de parvenir à l'intégration parfaite. Demain, nous ne nous poserons plus ce genre de questions.

(Source : The Guardian, via "What's Next". Lire aussi l'analyse de Jeff Jarvis)

jeudi 20 juillet 2006

Une année noire pour la presse nationale

A lire sur le blog de Jeff Mignon (ici) : "Le chiffre d'affaires de la presse française est en recul de 2,3 %. Il serait de 10,59 milliards d'euros. C'est ce que nous apprend la dernière étude de la Direction du développement des médias (DDM), organisme rattaché au service du premier ministre en France. C'est avant tout les ventes qui baissent : -2,6%, dont -1,6% pour les abonnements. Mais la pub est aussi en léger recul : -0,6%."

Des millions de télespectateurs pour YouTube

C'est le rêve de TF1 ou de Fox News. Et c'est un média TV sur Internet qui le réalise. Le site de diffusion de vidéo privée "YouTube" vient de passer la barre des 100 millions de vidéos vues par jour. En mars, on en comptait seulement 15 millions, mais déjà 70 millions en juin. Tout ça ne fait pas 100 millions de télespectateurs, le site, qui truste 60% du marché, affiche 20 millions de visiteurs uniques par mois. Mais le chiffre n'en reste pas moins énorme, vu le nombre d'employés (30) et le fait que les contenus sont gratuits puisque fournis par l'utilisateur. C'est une télé à la demande qui marche toute seule. Seul problème aujourd'hui, les coûts en bande passante sont pharaoniques (ils sont estimés à plus de deux millions d'euros par mois) alors qu'il ne semble toujours pas y avoir de modèle économique viable.
Mais on voit bien s'opérer la bascule. Les jeunes passent déjà plus de temps devant leur écran d'ordinateur que devant leur télé. Ils veulent du programme à la carte et ils veulent contribuer au contenu.
Et l'on commence à se demander pourquoi l'on nous oblige à suivre un horaire pour visionner les programmes des chaînes thématiques sur le cable ou le satellite.
En France, des chaînes ont entamé la grande mutation : le Wat de TF1 (du contenu créé par les internautes viendra alimenter un programme télé), ou Wideo de M6. Et le développement de la video on demand (VOD) avec la possibilité de télécharger sa série quelques heures après sa diffusion à la télé.
Restent les chaînes thématiques qui devront bientôt se transformer en distributeur de programmes à la demande... ou disparaître ? On se demande en effet à quoi peut bien servir une chaîne cinéma quand on peut télécharger des films à la demande sur sa télé...

(Source : Media and Tech. Lire également sur tous ces sujets le blog de Laurent Esposito)

La presse quotidienne régionale fait le pari du payant, sans conviction

Le quotidien Libération, qui consacre aujourd'hui un long article (ici) aux stratégies Internet de la presse quotidienne régionale française, fait le constat suivant : la PQR parie sur le web de proximité... payant.
Bruno Hocquart de Turtot, directeur général du syndicat régional de la PQR (SPQR): "Sur Internet, la stratégie consiste à donner gratuitement les informations générales et régionales, mais de faire payer le micro-local".
Et Christian Philibert, directeur général d'Ouest France : "De toute façon, la gratuité, ce n'est pas notre culture".
Dommage, la gratuité, c'est pourtant la culture des nouvelles générations. Libé résume : "les régionaux ont immédiatement compris l'intérêt financier et commercial de l'Internet" Sauf que tout le monde sait que si les régionaux parient sur l'actu locale payante, ce n'est pas pour gagner de l'argent (l'accès payant ne rapporte presque rien, les volumes sont très bas), mais pour protéger l'édition papier. Ce n'est donc pas un pari, mais un blocage culturel et générationnel.

Ce qui est dommage, c'est que cette info locale payante (notamment à cause des archives payantes) empêchent les journaux d'ouvrir leurs articles aux commentaires.
Les sites des quotidiens régionaux se sont construits comme des compromis.

Seule voix discordante, José Biosca, directeur général adjoint de la Dépêche du Midi (Toulouse), qui vient enfin de finaliser une longue négociation avec sa rédaction sur les droits d'auteurs (c'est l'un des principaux freinx au développement de la PQR sur le net) : La Dépêche est consultable en totalité et gratuitement sur son site "parce que nous sommes convaincus que faire payer la mise en ligne du journal est sans intérêt". Le quotidien travaille actuellement sur la possibilité pour l'internaute de personnaliser son info hyperlocale.

Le débat gratuit/ payant tel qu'il se présente aujourd'hui dans la presse française grand public n'est plus un débat, mais un conflit culturel. Il est d'ailleurs, sur le fond, sans intérêt. La question n'est pas de savoir si l'on doit mettre le contenu du journal papier gratuitement ou non en ligne. Mais de se demander : quel contenu devons-nous apporter aux internautes pour leur offrir le meilleur service ? Et quel modèle économique mettons-nous en place autour de ce concept ? Rien de plus. Et si l'on suit ce raisonnement, on se rend vite compte que le contenu hyper local en ligne n'est pas forcément le même que celui que l'on trouve dans le journal. De la locale sur le Net, oui, mais quelle locale ? Voilà la question.

Cette hyper-locale en ligne (que l'on pourrait renommer en "Internet de proximité") doit d'abord être utile et pratique (infos services, annuaires et agendas interactifs), communautaire (journalisme citoyen, blogs, photos personnelles...) et conversationnelle (des commentaires et du débat partout). Franchement, ce n'est pas vraiment ce contenu-là que l'on trouve aujourd'hui dans les pages locales des journaux. Non ?

mercredi 19 juillet 2006

Les blogs de l'été

A feuilleter tranquillement, le dossier du dernier numéro de Stratégies : "Les meilleurs blogs de l'année". 8 jolies pages consacrées à une sélection de 32 blogs. "Demain tous journalistes" en fait partie. Champagne :)

J'ai répéré également dans ce catalogue à la Prevert, l'excellent blog de Fred Cavazza (ici) sur le Web 2.0, celui de mon confrère Laurent Esposito (ici) sur l'avenir de la télé, le décalé "Culture-Buzz" de l'agence marketing du même nom (ici), ou encore l'étonnant "Buzz-blog" (ici) de Fabien Grenier.

Murdoch investit (aussi) dans le papier

Le géant de la presse, Rupert Murdoch, qui prophétise volontiers la fin des journaux papier dans un avenir proche, est aussi (et surtout) un pragmatique. Le patron de News Corp (The Sun et The Times pour le print et Myspace pour le web) envisagerait de lancer un quotidien gratuit du soir à Londres. Le "Project Gold", c'est son nom de code, viendrait concurrencer le pionnier suédois Metro. Et probablement "provoquer une nouvelle guerre des journaux dans la capitale", prévoit The Independant (ici).
Ce qui prouve au moins une chose : au-delà des prophéties, le support suit toujours le lecteur. Pas le contraire. La guerre web/print n'a pas lieu d'être.
Si le pragmatisme doit pousser les journaux à privilégier les développements Internet dans leurs budgets d'investissement, il doit surtout les guider à aller là où se trouve le consommateur d'infos.
L'audience est comme l'électricité, elle prend presque toujours le chemin le plus pratique. Or, dans les transports en commun, c'est encore le papier qui est le plus facile à lire. Il y a donc un marché.
The Guardian, qui a lui aussi donné radicalement la priorité à Internet, envisage de sortir un quotidien gratuit du soir à imprimer au bureau pour lire dans le métro (lire ici)...

(Toujours à propos de ce débat web/print, lire le post récapitulatif d'Emmanuel Parody et, en anglais, de Jeff Jarvis et de Roy Greenslade)

mardi 18 juillet 2006

Les blogs reconnus comme "moyen d'information"

Si vous ne l'avez pas encore consultée, je vous conseille de parcourir cette étude de crmmetrix (téléchargez la ici en format pdf). Elle place la France en tête des pays adeptes des blogs, après les Etats-Unis.
26,7% des internautes Français consultent au moins un blog par mois (il y a 26,5 millions d'internautes). 18,8% ont déjà déposé un commentaire sur un blog, tandis que 8,1% déclarent avoir déjà créé un blog (soit un peu moins de trois millions, ce qui est énorme). Les blogs sont considérés comme offrant une plus grande liberté d'expression, ils rapprochent les intervenants et leurs lecteurs et sont plus critiques que les autres modes d'information. Bref, les internautes les considèrent comme une véritable bouffée d'oxygène dans l'univers médiatique.
Un quart des internautes, ce n'est pas rien. Cette normalisation de la "pratique" du blog tend à imposer la conversation au coeur de la mécanique médiatique et commerciale.
Plus intéressant encore : la reconnaissance populaire du blog comme "moyen d'information". 74,4% des internautes consultant les blogs le font pour s'informer (contre 57% pour partager des expériences et passions). Et 80% des lecteurs de blogs jugent l'information qu'ils y trouvent plutôt crédible. Ce qui fait dire à Laurent Florès, CEO de crmmetrix que "l'élection présidentielle de 2007 se fera également sur les blogs."
Une tendance pressentie par des moteurs d'actualité comme Wikio, qui placent au même niveau les news des blogueurs et celles des médias traditionnels.
Enfin, si 90% jettent leur dévolu sur les blogs personnels, 38,5% déclarent consulter également les blogs de médias.
"Nous devons admettre que les blogs apportent une contribution massive (à l'information)", constate de son côté le chroniqueur média britannique Roy Greenslade (lire ici), qui pousse depuis des mois les quotidiens à expérimenter sur le Net. "Nous devons accepter les blogs comme faisant désormais partie de la sphère active"

mercredi 12 juillet 2006

"Demain, on n'imprimera plus de journaux"

C'est ce que prophétise Marty Weybret, le patron du Lodi News Sentinel, dans un éditorial intitulé "A quoi ressemblerons nous dans 125 ans ?" (lire ici, en anglais). Le Lodi News Sentinel est un petit quotidien régional américain couvrant l'actualité de Lodi, en Californie. 60.000 habitants pour la ville centre, et une diffusion du journal autour de 15.000 exemplaires (17.800 en 1992).
Et en lisant le long manifeste de Marty Weybret, publié samedi dernier, j'avoue avoir été assez ému. Sans doute parce que nous vivons tous la même chose. Nous, les acteurs de cette presse quotidienne régionale qui fait parfois triste mine aux yeux des jeunes générations. Alors que, dans son essence, elle n'a jamais été aussi indispensable à la communauté.
Voilà donc le patron d'une entreprise familiale qui écrit à ses lecteurs que le Lodi News Sentinel, leur journal, celui qui a accompagné leur quotidien durant des années, qui a peut-être publié la photo de leur baptème, puis celle de leur remise de diplôme, et annoncé un jour la mort d'un parent ou d'un voisin, que ce journal là est voué à disparaître sous sa forme actuelle. Pas tout de suite, mais sûrement. Un jour, l'imprimerie de papa fermera (le journal est dirigé par le père et ses deux fils). Webret leur écrit que l'histoire, là, aujourd'hui, est en train de souffler un autre air. Un autre vent. Qu'une grande page est en train de se tourner définitivement. Que le navire est sur le sable, un peu ébranlé, face à un nouvel océan, l'Internet.
Et que le Lodi News Sentinel est prêt à hisser ses voiles pour se lancer dans cette formidable aventure.
"Je suis sûr de cela, dans 125 ans, on n'imprimera plus de journaux à Lodi. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'y aura plus de journal. Si en 2113 les gens s'intéressent toujours à ce qui se passe dans leur communauté, alors il y aura toujours un business pour leur apporter des nouvelles sous forme électronique"
Marty Webret raconte le vieux combat des quotidiens régionaux pour ne pas perdre pied face aux médias radio, d'abord, puis la télé, et aujourd'hui cette hydre d'Internet : l'araignée Google, et l'ogre Monster.
C'est à qui sera le plus pratique. Et à ce jeu là, l'Internet et les innovations mobiles finiront par l'emporter un jour.
"Mais le vrai changement", ajoute Webret, "c'est l'interactivité. La possibilité pour le lecteur de nouvelles de devenir diffuseur. Nous avons toujours eu le courrier des lecteurs, mais quand votre opinion ou votre vidéo personnelle atteindra la communauté aussi facilement que nos infos, alors la société sera transformée. Ceux qui s'intéressent aux nouvelles seront capable d'être leurs propres reporters, ils influenceront donc notre traitement de l'information et décideront plus directement quelles infos concernant la communauté devront être couvertes."
Finalement, Webret voit dans le journal de demain non pas la disparition d'un métier, le journalisme, remplacé par le lectorat (comme on pourrait le croire à tort) mais une interactivité instantanée et vivante. Une sorte de conférence de rédaction ouverte et permanente avec les lecteurs. Un autre monde.
Sans arbres coupés.

(Source : Lodi News Sentinel, via Cyberjournalist.net)

"Demain tous journalistes" sélectionné par le quotidien "Le soir"


J'apprends par hasard que le quotidien belge "Le soir" a fait de "Demain tous journalistes" son blog de la semaine. Merci à Régis Strebelle (lire ici son article) :)

mardi 11 juillet 2006

Le tour de France en 3D avec Google

La société du Tour de France s'est associée à Google pour proposer aux internautes d'explorer l'intégralité du parcours de la course en trois dimensions (ici). Délaissant la solution française Géoportail, les organisateurs ont préféré le logiciel Google Earth qui propose une cartographie en relief.
Voilà une bonne idée d'exploitation de Google Earth, dont aurait pu s'emparer la presse.
A voir également, un autre "mash-up", avec Google Maps, cette fois : pour suivre en direct le classement des principaux coureurs du Tour sur la carte (ici ou sur le site de Velonews). Etonnant !

lundi 10 juillet 2006

Le futur des journaux en ligne selon Rupert Murdoch

Une citation extraite de l'excellent dossier (à lire ici) du magazine Wired sur le géant de la presse, Rupert Murdoch, convaincu que les journaux papiers disparaîtront dans les prochaines années et que l'Internet est le nouvel âge d'or des médias. Voici ce qu'il déclare à propos des journaux et de ce qu'ils peuvent espérer d'Internet :

"Les journaux peuvent-ils faire de l'argent online ? Bien sûr. Peuvent-ils en faire suffisamment pour remplacer ce qu'ils perdent aujourd'hui ? Aujourd'hui, il y a tellement de compétition sur Internet, une concurrence si neuve, si peu chère, que la réponse est non. Mais ne voyez pas tout ça (les news online) comme un journal. Voyez le comme une entreprise journalistique. Si vous faites autorité en la matière, si vous avez la foi, et si vous pouvez faire en sorte que vos infos soient intéressantes, alors vous survivrez. "
Selon une étude réalisée pour l'UK Association of Online Publishers (ici), les activités en ligne contribueront à hauteur de 40% des revenus des journaux d'ici 2012 (17% en moyenne aujourd'hui en Grande Bretagne).

(Sources : Emmanuel Parody, Wired)

Zidane : comment El Mundo a traité "l'affaire" sur Internet


Tragique et symbolique fin de partie pour Zinédine Zidane, hier soir lors de la finale de la coupe du monde de la Fifa 2006. Mais beau clin d'oeil de l'histoire pour ceux, médias en tête, qui en faisaient un dieu la veille. Et qui se sont réveillé ce matin avec, devant leur tasse de café, un Zidane simple joueur de foot. Ce qui est déjà beaucoup.
Une info forte qu'El Mundo a choisi de traiter sur Internet (ici) en faisant appel à une narration multimedia innovante. Une sorte d'infographie-diaporama interactive qui reprend, image par image, le tristement célèbre "pétage de plombs" du champion français. Moi, j'aime beaucoup. C'est tout simple à réaliser, et c'est un bon exemple de ce que l'on peut inventer aujourd'hui pour raconter des histoires en ligne.

(source : What's Next)

jeudi 6 juillet 2006

Journaux : des idées pour "travailler" avec ses lecteurs

Brad Dennison, de l'Associated Press Managing Editors (APME) propose (ici en anglais) quatre techniques pour mieux connaître ses lecteurs. Jeff Mignon les a traduites en français sur son blog (ici).
Ce sont de bonnes idées. La presse quotidienne régionale regorge d'idées de ce genre, mais il est souvent difficile de pérenniser les projets. Parce qu'ils sont presque toujours faits en marge de l'activité rédactionnelle, et qu'ils demandent une forte mobilisation de la rédaction. Mobilisation d'autant plus nécessaire que le lectorat de la PQR ne vient plus aussi naturellement vers son journal qu'avant. Sans volontarisme, pas de bonnes idées...
A suivre, à ce propos, le très bel exemple du quotidien espagnol "El Correo" (groupe Vocento) qui a fait de l'interactivité un véritable produit rédactionnel ("enlaCe") : publications spécifiques print et web, équipe dédiée, multiplication des outils d'interactivité (avec des idées vraiment extraordinaires... mais j'y reviendrais dans un prochain post)... Résultat ? Un beau succès éditorial, et un rajeunissement du lectorat (49% a entre 20 et 44 ans, contre 46% en 2004).

Le Figaro truste les PA en ligne

Le groupe du quotidien national français (via sa régie publicitaire "Publiprint") et le site d'offres d'emploi en ligne Keljob ont annoncé hier "une rapprochement stratégique". C'est ce qu'on lire sur le site de l'intéressé (ici) :
"Il vise à créer un leader des « classifieds » - annonces classées - sur Internet. Cette alliance rassemble les marques Keljob, Cadremploi et Explorimmo. Elle donne naissance à un groupe dont le chiffre d'affaires combiné des trois entreprises qui le composent était de près de 30 millions d'euros en 2005."
Ce qui permet aux nouveaux partenaires de se hisser "à la première place des acteurs privés de l'emploi et de la formation sur le Web en France, détrônant son principal concurrent, l'américain Monster. Le mouvement s'inscrit dans un ambitieux programme de déploiement numérique du Figaro. La société holding sera détenue à plus de 40 % par Publiprint."
La presse française commence vraiment à s'activer sur le marché des PA en ligne, où l'on commence à voir se profiler de nouvelles synergies entre les médias, seul moyen de faire face à une concurrence hyper agressive.
Mais les journaux, surtout locaux, sont encore à des années lumière de leur potentiel business dans ce domaine.

A lire sur ce sujet, le post bien renseigné de Pierre Chappaz (ici).

(Source : Figaro.fr, via l'Ifra)

mercredi 5 juillet 2006

Peut-on encore lancer un quotidien payant en France ?

Alors que la presse nationale française payante continue de sombrer dans la déprime, les décideurs allemands jouent les optimistes. Le groupe d'Axel Springer (Bild, Die Welt) s'apprêterait à lancer un nouveau quotidien... en France. C'est ce qu'assurait le "Le Parisien/Aujourd'hui en France" hier (repris par "Le Monde" ici), hypothèse confirmée aujourd'hui par le porte-parole du groupe berlinois (ici)
Ce nouveau quotidien s'inspirerait du concept de "Bild", le journal populaire allemand détenu par Axel Springer. Il serait distribué à 600.000 exemplaires et vendu à un prix très bas : 0,50 centimes d'euros. Toujours selon le "Parisien", c'est Didier Pourquery, l'ancien patron du gratuit Métro (et ancien rédact chef de feu "Infomatin"), qui serait nommé à la tête du titre.
A l'heure où la presse papier payante semble condamnée face à la génération du gratuit et du Net, l'annonce du lancement d'un nouveau quotidien a de quoi surprendre. Sauf que ce n'est pas la première fois que le groupe lance un nouveau quotidien, et que leurs dernières audaces ont été couronnées de succès. C'est ce que Mathias Döpfner, CEO d'Axel Springer, était venu expliquer en juin dernier à Moscou lors du Congrès mondial des journaux : "Print is not dead ! And journalism is alive", déclarait-il, chiffres à l'appui.
En 2004, le groupe allemand lançait "Die Welt Kompakt", une version tabloïd et "jeune" du quotidien "Die Welt". Un contenu très différent, mais produit par la même équipe éditoriale que ses deux grandes soeurs ("Die Welt" et le quotidien régional berlinois "Berliner Morgenpost"). Le journal est également moins cher (0,50 centimes) et bénéficie d'un bouclage plus tardif. Résultat : une augmentation de la diffusion de l'ensemble des journaux du groupe de 25% ("Die Welt", "Die Welt Kompakt", et une cannibalisation avec "Die Welt"" de 5%. Intéressant : le lectorat est composé à plus de 50% de non-lecteurs, annonce Döpfner. Précisant qu'il s'agit d'un "lectorat dynamique, jeune et éduqué". "C'est évidemment un modèle de lancement de quotidien, tous les coûts étant marginaux (impression et rédaction). Un avantage dont ne disposera pas le groupe en France.
Autre succès "springerien" : le lancement réussi en 2003 d'un quotidien populaire en Pologne. Conçu sur le modèle de "Bild", "Fakt" est devenu le plus gros quotidien national polonais en seulement trois mois, avec trois millions de lecteurs (sur 38 millions d'habitants) et 500.000 exemplaires vendus. La France n'est évidemment pas la Pologne, qui souffrait à l'époque d'une sous-implantation de la presse quotidienne. Mais les bons résultats du groupe d'Axel Springer font réfléchir. Le print a-t-il encore de l'avenir ?
Nous aurions tort de déclarer mort un support qui ne l'est pas. Pas encore. Même si en France, après l'explosion en vol de France Soir, et la déroute de Libé, je ne vois pas qui pourrait venir décrocher la timbale du print, si elle existe. Mais qui sait ?
L'avenir n'est ni aux gardiens du papier, ni aux prophètes du Web, mais aux pragmatiques qui auront su aller chercher leurs lecteurs là où il fallait les trouver. Non?

lundi 3 juillet 2006

La coupe du monde en virtuel

Une belle illustration des synergies possibles entre jeu vidéo et médias : la BBC propose (ici) aux internautes de revoir virtuellement, en 3D, les buts de la coupe du monde de football 2006.
"Virtual Replay" est une application en flash qui permet d'observer les meilleurs actions du match depuis n'importe quel point de vue : buteur, gardien, joueur... on peut même se mettre à la place du ballon.
J'ai essayé avec France-Brésil et France-Espagne, et je ne me lasse pas de jouer avec... Je trouve ça vraiment fascinant.
L'industrie des médias devrait observer d'un peu plus prêt ce qui se fait aujourd'hui dans l'univers des jeux vidéo, notamment en matière d'interface et d'interactivité. Les journaux en ligne devraient penser à intégrer des jeunes issus du jeu vidéo dans leurs équipes de développeurs, et leur demander de travailler à la création de nouveaux outils interactifs pour la presse en ligne. On pourrait avoir de belles surprises...

La BBC propose également, sur son site consacré au mondial, la diffusion des matchs "en vrai"... et en direct (pour les Britaniques seulement). C'est une première. Grâce à ce service inédit, 1,7 millions d'internautes ont pu suivre la coupe du monde sur Internet. On peut penser que le prochain mondial se regardera sur Internet et sur téléphone mobile...
Le site BBC Sports reçoit chaque jour la visite de trois millions de personnes.

Si vous avez des problèmes pour charger l'application sur le site de la BBC (elle a tendance à coincer au milieu du chargement), vous pouvez également la retrouver sur un site danois : ici.
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(Sources : Techcrunch, Presse-citron, journalim.co.uk)

Liberation 2.0 : le commentaire est (presque) libre

Avec la nouvelle version de son site Internet, lancée ce matin, Libération devient le premier quotidien français payant à autoriser les commentaires sur ses articles. Mais pas le premier. Le quotidien gratuit "20 minutes" pratique déjà la conversation depuis un certain temps, tandis que "Le Monde" ne l'autorise qu'à ses abonnés (!).
Quoi qu'il en soit, la démarche est suffisamment rare dans le monde de la presse papier pour le signaler. Même si Libération n'est pas allé jusqu'à autoriser les commentaires sur tous ses contenus, mais sur "une sélection d'articles". Bizarre... Ainsi, je peux réagir aux "soldats tués à Bouaké: la France a laissé faire", mais pas sur le projet socialiste pour 2007... ni sur les films actuellement en salle.
Le commentaire est devenu tellement naturel sur le Net, que l'on a de plus en plus de mal à comprendre son absence... Libé ouvre timidement la marche. Les autres journaux suivront. Irrésistiblement.
Autre fonctionnalité web 2.0 : la possibilité d'envoyer ses photos sur une sorte de blog collectif, sur des sujets d'actualité. L'expérience, qui avait été lancée à l'occasion du CPE, est donc désormais généralisée.
On peut également s'abonner à plusieurs dizaines de flux RSS différents, selon la thématique qui nous intéresse.
Libé prépare pour la rentrée une édition "premium" pour ses abonnés,promettant à ces derniers "une relation privilégiée avec les journalistes de Libération".
Bref, ce n'est pas une révolution, mais c'est déjà un bon début, même si, à force de vouloir trop en mettre, le site a perdu de sa clarté. A suivre...

samedi 1 juillet 2006

Local : le prochain champ de bataille du Net

Après avoir envahi le monde, Google et Yahoo s'attaquent au voisinage. La prochaine bataille du Net se fera au coin de la rue, les géants du réseau l'ont compris.
"Google et Yahoo connaissent l'importance du local".
C'est le message alarmiste qu'a voulu faire passer Stephen Gray, directeur de "Newspaper Next" (Le programme d'innovation de l'Americain Press Institute) en ouverture du "Media Giraffe Project" qui se tient à Amherst (USA) jusqu'au 1er juillet.
Alarmiste, mais réaliste.
Tous les efforts des grands stratèges de l'Internet (Google, Yahoo, Microsoft) sont désormais tournés vers les services et l'information locale.
La proximité sera l'enjeu majeur des cinq prochaines années. C'est une menace, mais aussi une formidable opportunité pour la presse locale.

"Aujourd'hui, les gens veulent savoir ce qui se passe près de chez eux", a poursuivi Stephen Gray devant les représentants de l'industrie de la presse américaine. Une industrie sous la menace de ce qu'il appelle "disruptive innovation" (innovation de rupture) : des développements technologiques en rupture avec l'industrie traditionnelle, et qui pourraient pousser les lecteurs à chercher des sources alternatives d'information. Si les journaux ne prennent pas les devants.
Or, rapporte Gray, une étude de "Newspaper Next" révèle que 72% des patrons de presse ne savent pas comment transformer leur business pour s'adapter à l'ère digitale.
Inquiétant.


"Il est clair que l'industrie ne sait pas ce qu'il faudra faire demain."
J'ajouterais qu'elle n'a non seulement pas de vision claire des changements majeurs qu'elle devra opérer demain, mais que la presse locale (qui est la première concernée) reste encore persuadée de maîtriser une information exclusive qui ne sera jamais concurrencée, les modèles économiques de l'info hyperlocale n'étant pas encore viables.
Au lieu d'être un atout, cette "presque-illusion" de maîtrise de l'info locale s'avère être un véritable frein à l'innovation.


"Les journaux doivent avoir une approche de l'individu et se demander : qu'est-ce qui se passe dans la vie quotidienne des gens qui peut les pousser à rechercher de l'information ?"
Cela veut dire, concrètement qu'il faut essayer de cerner les différents publics (marchés de masse ou de niche) que la presse locale veut toucher, comprendre leurs besoins, et voir comment elle peut y répondre : avec quels produits, c'est à dire quels contenus et quels outils sur quels supports.


"Les médias traditionnels doivent maintenir leur coeur de marché (le quotidien papier) tout en développant leurs propres "disruptive products", leurs propres produits innovants afin de répondre aux besoins de leurs communautés."

Ca veut dire quoi ? Ca veut dire que les journaux ne doivent pas "faire de l'Internet", comme je l'entend dire parfois, c'est à dire s'adapter parce qu'on y est bien obligé... c'est à dire recopier, en moins bien, ce qui se passe ailleurs. Ils doivent au contraire saisir cette formidable opportunité : tirer partie de leur immense expérience du local pour inventer de nouveaux produits.
"Ces innovations constituent une opportunité pour les journaux d'étendre leur marché et d'augmenter leur audience."


(Sources : journalism.co.uk, et "Media Giraffe Project")